Utiliser de l’acide acétique pour contrôler les mauvaises herbes en production de pommes de terre biologiques

Centre d’agriculture biologique du Canada

Des chercheurs de l’Île-du-Prince-Édouard rapportent des résultats encourageants suite à l’utilisation d’un ingrédient-clé inclus dans le vinaigre pour contrôler les mauvaises herbes en production de pommes de terre biologiques.

Cet ingrédient actif du vinaigre est l’acide acétique, un composé chimique naturel qui peut donc s’avérer une solution de remplacement à l’utilisation d’herbicides synthétiques.

Le vinaigre ménager contient normalement environ 5% d’acide acétique, mais n’était pas suffisamment puissant pour contrôler les mauvaises herbes, dit Jerry Ivany, le principal auteur de l’étude.

Le défi des chercheurs était de déterminer la concentration la plus efficace en acide acétique qui permettrait de contrôler les mauvaises herbes sans causer de dommages significatifs aux récoltes. Le moment de l’application était aussi un facteur critique.

Les chercheurs ont donc expérimenté trois concentrations, 10, 20 et 30%, appliquées à divers stades de la croissance des plantes. Après deux années de recherche, Ivany a observé des résultats préliminaires encourageants, rapportés dans “Lutte contre les mauvaises herbes avec l’acide acétique dans les champs de pomme de terre (Solanum tuberosum L.)” publié dans in the Canadian Journal of Plant Science.

La concentration de 20% est la plus efficace, lorsqu’appliquée sur une bande de 30 cm au dessus du rang de pommes de terre, à 300 litres par hectare. L’application de l’acide acétique aux premiers stades de la croissance foliaire des mauvaises herbes – et avant que les feuilles des pommes de terre émergent – a résulté en un contrôle semblable à celui de la métribuzine, un herbicide synthétique. Les mauvaises herbes entre les rangs ont été enlevées mécaniquement.

Six semaines après le traitement, l’acide acétique contrôlait 86% du chénopode blanc et 96% de la spargoute des champs, s’avérant légèrement moins efficace que la métribuzine dont le niveau de contrôle est de 100%. Quant à la renouée liseron, le niveau de contrôle par l’acide acétique a égalé 93%, étant plus élevé que celui par la métribuzine à 80%.

Le moment de l’application est particulièrement important car les feuilles des pommes de terre qui croissent depuis les tubercules prennent de 10 à 14 jours à émerger. Les mauvaises herbes à larges feuilles visées se développant plus rapidement, il est possible de contrôler les mauvaises herbes avec l’acide acétique sans endommager les plants des pommes de terre.

« Si vous pouvez l’appliquer avant que la récolte émerge… vous pouvez contrôler les mauvaises herbes sans affecter la récolte » a déclaré Ivany lors d’une entrevue téléphonique.

Les pommes de terre sont produites dans toutes les provinces du Canada et la production de pommes de terre biologiques a augmenté au cours des dernières années. En 2004, 938 hectares de pommes de terre biologiques ont été cultivés au Canada.

Même si la recherche visait principalement la culture de pommes de terre, les résultats pourraient être comparables pour d’autres cultures. Chaque culture doit cependant être considérée individuellement et les divers stades de croissance être pris en compte.

« Vous avez à travailler de long en large pour trouver votre champ d’action…. Cela vous indique le moment de l’application, le stade de croissance de la plante et le taux » dit Ivany. « Vous avez à considérer l’ensemble ».

Ces mêmes observations s’appliquent aux producteurs biologiques et conventionnels. Ivany dit que les deux types d’agriculteurs peuvent profiter des résultats de  la recherche. Les agriculteurs sauveront de l’argent si un traitement à l’acide acétique coûte moins cher qu’un herbicide synthétique tout en procurant des niveaux de contrôle comparables.

Les producteurs biologiques ont traditionnellement disposé de moins de solutions. Les mauvaises herbes sont principalement contrôlées mécaniquement. « Vous pensez à la culture, au temps de labour et à la préparation de la terre pour contrôler les mauvaises herbes. »

Ivany dit que l’idée de lancer une recherche sur l’efficacité de l’acide acétique venait de la quantité considérable d’articles publiés sur le contrôle des mauvaises herbes par l’utilisation de vinaigre. « Le produit chimique que nous considérions est un produit naturel ».

La prochaine étape était de parfaire le concept pour trouver des produits conformes à la norme biologique canadienne, laquelle détermine ce qui peut et ne peut pas être utilisé en production biologique.

Le vinaigre était acceptable et la recherche initiale a montré qu’il y avait un bon potentiel lié à l’utilisation de l’acide acétique comme agent de contrôle des mauvaises herbes en production de pommes de terre.

Cependant, davantage de recherche est nécessaire pour utiliser un produit dans le champ d’un producteur.

Comme un produit chimique est en cause, « les producteurs ne peuvent l’utiliser légalement » que s’il est homologué par Santé Canada. Tous les produits utilisés en production horticole au Canada doivent être homologués sous la Loi sur les produits antiparasitaires.  

Ce processus d’homologation, habituellement entrepris par une compagnie privée, doit être appuyé par une information et des études considérables et peut s’étaler sur de nombreuses années. L’homologation doit préciser le type d’utilisation, les mauvaises herbes qui seront contrôlées, les taux et concentrations du produit et d’autres informations. 

Ivany a dit que ce processus peut être long mais qu’il est essentiel car « c’est fait pour assurer la sécurité » des aliments.


Rédigé par Steve Harder pour le CABC. Pour davantage d’information : 902-893-7256 ou oacc@dal.ca.